mardi 29 janvier 2008

Marguerite de Montboissier-Beaufort-Canillac

Elle était issue de l’illustre famille de Canillac, qui avait en Auvergne des possessions territoriales si considérables et notamment, à cette date, aux environs de Courpière, la baronnie d’Aulteribe et les seigneuries d’Aubusson et de Boissonnelle. Elle avait compté parmi les siens Pierre le Vénérable et la bienheureuse Rhingarde.
Avant de devenir titulaire du prieuré de Courpière, Marguerite de Beaufort l’avait été de celui de Champagnac en Haute-Auvergne. Le 23 novembre 1555, en effet, Mre Gabriel Vernegeoul, prêtre de Champagnac, prenait possession de ce prieuré pour et au nom de Mme Marguerite de Beaufort-Montboissier, «religieuse de Courpière. » Ce bénéfice fondé jadis pour des Bénédictines nobles par la maison de Sartiges, était vacant par suite du décès de Catherine d’Auriolles, et Marguerite de Beaufort l’avait obtenu par provisions de la cour de Rome, le 7 juin 1555. Peut-être fut-elle troublée dans la jouissance de ce titre. Une nouvelle signature de Rome, en effet, lui conféra encore une fois, le 17 juin 1558, le prieuré de Champagnac.
Toujours est-il qu’elle détint celui de Courpière, l’espace de 25 ans, de l’an 1589 à l’an 1614. Elle mourut, le 25 juin 1614. Voici son acte de décès :
«Le 25 juingt 1614 decedast reverende dame Marguerite de Beaufort, dame prieuze de Corpière, environ 6 heures du matin. Et se mesme jour à 4 heures du soir, fust mise en possession dudict prieuré revérende dame Marguerite de Fayol, y adcistant Monsieur de la Porte, chanoine de Clermont, pour et au nom de ladicte dame, et moy, curé soubzsigné l’en mist en possession. Le lendemain jeudy 26 juingt fust ensépulturé ladicte dame.» Signé : Clerc, curé.
En 1597, saisie avait été mise sur une partie des dîmes de son prieuré. Nous avons retrouvé l’affiche ou pancarte dont tous les curés de la région donnèrent lecture, à leur prône, le dimanche 12 janvier 1597. En voici le texte :
«Quy voudra achepter et mettre enchérir les dismes accoustumées à lever sur les villages du Vernet, paroisse de Corpière, le Chier paroisse de Sermentizon, et percières d’Escoutoux appartenant à révérende dame Marguerite de Beaufort, dame prieure de Corpière, pour survenir au payement de la somme de 54 escus de la taxe faicte sur ledict prieuré pour le faict de l’aliénation du temporel de l’églize, soient et comparaissent par devant les commissaires commis et députés au faict de ladite aliénation en la maison épiscopale de l’évesché de Clermont audict Clermont au vendredy 24° jour du présent moys de janvier 1597, qui recevront les myses et enchères paieront à la vante d’extrousse et adjudication par décret au plus offrant et dernier enchérisseur.
Lesdistes dixmes et percières consistent et ont accoustumé estre levées, prises et perçues :
Assavoir la dixme appellée les Percières, située en la paroisse d’Escoutoux, consistant en une terre située dans ladicte paroisse près de la rivière de Dore et entre ladicte rivière et le bezal de Voreton, contenant entour 3 septerées, jouxte la terre des hoirs feu Gilbert Voreton d’une part, la terre de Gilbert Mary d’aultre, la terre des hoirs feu Michel Gardelle et le chemin tendant de Vollore aux Ferriers d’aultre, comme et ainsy que ladicte dame l’a accoustumé lever et joyr.
La dixme appelée du Chier, située en la paroisse de Sermentizon et en la seigneurie d’Aulterive, contenant entour, tant en chaume, bruyères, bastiments, près, terres, 5 septerées jouxte le rif de Leylion d’une part, les prés, chaumes et bruyères du lieu Chaponnerie mouvant du seigneur de La Barge, d’aultre et les terres, chaumes et bruyères de la dixmerie de la seigneurie dudict Aulterive, du curé de Sermentizon, d’autrepart.
La dixme appelé du Vernet, en la paroisse de Corpière des fins d’icelle, contenant tant en chaume, bruyères, boys et terres, entour 6 septerées, jouxte le grand chemin tendant dudict Corpière à Ollyergues d’une part, ung aultre petit chemin tendant du Vernet à Sauviat d’aultre, certaing estant ou serve, bruyères, chaumes du seigneur ou dame de Froideville et aussy certains prés, pasquiers, terres et chaumes des habitants du Vernet d’aultres parts.
»
Un an avant sa mort, le 10 avril 1613, Marguerite de Beaufort-Canillac avait consenti un acte de donation du domaine de Fermouly en faveur d’un de ses proches, Henry de Montboissier-Beaufort-Canillac, premier auteur de la branche des marquis du Pont du Château. Le fief de Fermouly appartenait au prieuré de Courpière. Me Marguerite de Beaufort en avait l’usufruit et non la nue-propriété. La donation qu’elle en fit était donc nulle de plein droit. Mais que penser de cette prieure qui aliène ainsi les biens de son monastère ? C’est, quelques mois avant sa mort, alors que ses facultés étaient très affaiblis, que la vieilles prieure, cédant aux obsessions de sa famille, signa cet acte et sans doute elle n’était plus en état alors de comprendre la gravité de la faute qu’on lui faisait commettre. Mais Henry de Beaufort pouvait-il, lui, de bonne foi entrer en possession d’une terre ainsi usurpée. C’était le temps, ne n’oublions pas, où dans la maison de Canillac tout le monde ne se montrait pas scrupuleux observateur des préceptes du Décalogue, et Henry Beaufort, marquis de Pont du Château, était le grand-oncle de ce Gabriel de Montboissier de La Mothe Canillac, qui fut condamné, le 8 octobre 1665, par arrêt des Grands Jours d’Auvergne, à avoir la tête tranchée, à cause de ses nombreux attentats commis contre la vie, l’honneur et la propriété d’autrui. Toujours est-il que Henry de Beaufort-Canillac et son fils Guillaume jouirent du domaine de Fermouly jusqu’à l’année 1642.
Le 10 novembre 1642, Gabrielle de Forsat, prieure de Courpière, désirant faire rentrer sa maison en possession de ce fief, le racheta au prix de 2.000 livres, à Guillaume de Canillac. Mais dans la suite, à la date du 1er mars 1666, une autre prieure, Françoise de Forsat, se pourvut « devant nos seigneurs du grand conseil en lettres de recizion de ces deux contracts d’aliénation et de vente du leu noble et domeyne de Fermouly indeulment consantis» et demanda, en outre, la restitution des 2.000 livres versées en 1642 entre les mains de Guillaume de Beaufort, avec tous les intérêts échus depuis. Un arrêt du 14 août 1669 lui donna raison, mit les parties en l’état où elles étaient avant ces deux contrats d’aliénation et condamna Paul Guillaume de Canillac, fils d’autre Guillaume et petit-fils d’Henry à rendre la somme principale de 2.000 livres, celle en plus de 2.576 livres pour les intérêts échus depuis le 26 décembre 1643 jusqu’au jour dudit arrêt et, en outre de celle de 289 livres 9 sols, représentant les frais que Françoise de Forsat avait faits pour poursuivre cette affaire. Paul Guillaume de Canillac s’adressa alors aux supérieurs de Mme Françoise de Forsat, leur «remonstra que ses pères et ayeul avoient procédé de bonne foy aux stipulations des dicts deux contracts et que ces deux contracts ne leur avoient pas esté purement lucratifs, comme ladicte dame le prétendoit». «Les supérieurs ayant entendus les raizons, sur ce propozées verbalement, réglèrent que Paul Guillaume de Canillac verserait dans l’année 1.000 livres entre les mains de Mme de Courpière et un peu plus tard 4.000 autres livres, ou les intérêts des dites 4.000 livres, à raison d’un sol par livre». Cette transaction fut conclue au parloir du couvent de Courpière, le 7 octovre 1760 en présence de révérend seigneur messire Pierre de Gourdon, seigneur prieur de Sauviat, de messire Maximilien de Beaufort-Canillac, seigneur et baron d’Aulterive et autres places, de messire Noël de Verdonnet, escuyer sieur dudit lieu, de noble François Fournier, sieur des Rioux, de Barnabé Brosseau, conseiller au bureau de Courpière, de maîtres Jean-Baptiste Dalmas et Antoine Dumas, tous deux avocats en parlement qui signèrent avec les parties l’acte reçu Chossier, notaire royal.
Dans la suite, un arrêt du Présidial de Riom condamna Mre Gabriel de Beaufort-Canillac, chevalier, seigneur de Lignat et autres places, co-héritier avec le marquis du Pont du Château, son cousin germain, de feu Henry de Beaufort, à payer la moitié de cette somme de 5.000 livres.Les seigneurs de Lignat amortirent avec le temps cette dette. Mais les marquis de Pont du Château payèrent jusqu’à la Révolution française à Mme la prieure de Courpière la rente de 200 livres stipulée par l’acte du 7 octobre 1670. (Abbé Adrien Adam « Courpière » Res Universis, Paris, p. 24 à 26)

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